Le dernier chant d’Orphée – Robert Silverberg : une réécriture poétique du célèbre mythe grec

51JJS6ianPL._SX304_BO1,204,203,200_Avant toutes choses, je remercie les éditions ActuSF et Jérôme Vincent pour la découverte de la nouvelle de Robert Silverberg, Le dernier chant d’Orphée.

Adorant le mythe d’Orphée et grande fan des films de Cocteau (son Orphée campé par un superbe Jean Marais est tout simplement sublime de poésie), je ne pouvais qu’être intéressée par une réécriture de cette histoire. En général, c’est d’ailleurs un mauvais choix pour moi car mes attentes sont hautes. Qu’en est-il avec la plume de Robert Silverberg ?

Résumé : On dit qu’il pouvait, par son chant, charmer les animaux et les arbres, sa voix fit chavirer les sirènes elles-mêmes. Mais son cœur appartenait à Eurydice, et lorsque la mort vint la lui ravir, Orphée se présenta aux portes des enfers, armé de sa seule lyre, afin de reprendre à Hadès l’âme de sa bien-aimée.
Robert Silverberg est l’un des derniers maîtres de la science-fiction américaine. Mais c’est dans la veine de Gilgamesh, Roi d’Ourouk que l’auteur des Monades Urbaines et du Cycle de Majipoor revient pour cette réécriture épique du mythe d’Orphée.

Dans cette nouvelle, Robert Silverberg réécrit le mythe d’Orphée mais pas seulement. Le dernier chant d’Orphée relate les faits principaux de sa vie que le poète lui-même conte à son descendant. De sa naissance à ses dernières aventures, on suit ce héros demi-dieu à travers l’Empire Hellénistique (323-30 av. J.-C.). Le récit est donc à la première personne. J’ai presque envie de dire, obligé avec un personnage d’une telle envergure. Certains héros que ce soit par leur nature ou leur charisme amènent fondamentalement à écrire à la première personne. En tant qu’autrice également, j’ai pu me rendre compte que ce n’est pas tellement l’auteur qui choisit la narration de son récit mais bien les personnages et le type de récit.

C’est ce que j’ai apprécié avec cette nouvelle : la construction du récit. Silverberg n’échappe pas à l’histoire entre Orphée et Eurydice et s’en débarrasse assez rapidement puisqu’il commence pratiquement son récit avec. Quand je parle de s’en débarrasser, c’est aussi car c’est ce que fait Orphée dans son discours, mais la poésie est bien présente et on ne sent pas le récit bâclé sur ce passage inévitable à toute réécriture d’Orphée. Cela dit, on sent que c’est particulièrement avec les Argonautes que l’auteur se régale. La quête de la Toison d’Or est ce qui donne tout le corps de son récit et j’ai aimé retrouvé ce mythe que je connaissais moins que le passage aux Enfers. Alors certes, j’aurais aimé une réécriture longue et détaillée à la recherche d’Eurydice (peut-être faut-il que je le fasse moi-même finalement), mais les choix de Silverberg n’en sont pas moins intéressants. Il s’attache principalement à l’ascendance divine d’Orphée, ce qui le rend un peu pédant parfois je le reconnais. Pourtant j’ai adoré la notion de Fatum, le destin, la volonté divine, qui transcende l’histoire et qui rend Orphée presque insensible à ce qui lui arrive « car c’est la volonté des dieux ».

C’est un sujet extrêmement intéressant qui amènerait à un débat sans fin sur la puissance du fatum que ce soit en littérature ou dans la réalité. Certaines sociétés et religions vivent au quotidien avec la même pensée qu’Orphée, je pense particulièrement à l’Inde puisque j’y suis allée récemment, contrairement à notre occident cartésien qui ne conçoit plus du tout ce fatum comme logique. Cela pose des questions ethnologiques qui m’intéressent et que j’aimerais développer par la suite avec de nouvelles lectures. Malgré le fait que la spiritualité ne soit pas spécialement au cœur du récit de Silverberg, je n’ai pas pu m’empêcher de relever ce détail.

D’un point de vue purement esthétique, j’ai aimé la poésie de l’écriture qui colle parfaitement au thème d’Orphée. Certes, un peu mise de côté avec les Argonautes mais quand même.

Lire ou ne pas lire : Le dernier chant d’Orphée de Robert Silverberg ?

Même si le récit n’est pas parfait pour tout le monde et que l’auteur a pu faire des choix qui divisent, ce texte est une évidence pour tout amateur de mythologie grecque ou d’Orphée tout simplement. J’ai aimé découvrir une nouvelle facette du mythe, une nouvelle interprétation, puisque finalement, c’est bien ce que donne à faire la mythologie antique pour les artistes d’aujourd’hui : appropriation et interprétation. Pas besoin de coller complètement au mythe, pas besoin d’écrire ce que l’on retrouve partout. Mais laisser place à l’imagination, rendre sien puis offrir à nouveau au monde ces histoires qui traverseront l’espace-temps.

Aimez-vous la mythologie ? Avez-vous des préférences ? Nordique, égyptienne, grecque, incas, japonaise…?

6 réflexions sur “Le dernier chant d’Orphée – Robert Silverberg : une réécriture poétique du célèbre mythe grec

    • Effectivement ce sont des mythologies vraiment très riches et intéressantes (bon j’avoue que perso, je les aime toutes même si je n’en connaît pas tant que ça et je trouve que c’est une base exceptionnelle pour connaître la mentalité d’un peuple)

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